Certaines affirmations doivent être prises au second degré. Tel est le sens qui doit être donné au titre du présent post qui, en réalité, pourrait se lire : pourquoi cautionner cette nouvelle aberration administrative en déclarant à l’INDS vos études rétrospectives correspondant à la MR-004 ?
Mais revenons sur les faits à l’origine de ce post.
Comme vous le savez déjà ou vous allez le découvrir, la période estivale a encore donné lieu à de nombreuses publications réglementaires dont le décret n° 2018-687 du 1er août 2018 destiné à préciser les nouvelles conditions d’application de la nouvelle Loi Informatique et Libertés (LIL).
Ce décret est donc venu modifier et compléter les précédents décrets d’application de la LIL dont certaines dispositions encadrant les traitements de données personnelles dans le domaine de la santé.
Au titre des articles modifiés par le décret n° 2018-687, nous pouvons souligner l’article 34-2 qui précise les conditions dans lesquelles un responsable de traitement réalise une déclaration de conformité à une méthodologie de référence.
Cet article 34-2 avait été créé par le décret n°2016-1872 du 26 décembre 2016 dans les suites de la Loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé (dite également « Loi Touraine ») lorsque le ministère de la santé a décidé de procéder à la fusion des chapitre IX et X de la LIL.
Il convient de se remémorer cette période car c’est également à ce moment que le ministère de la santé a voulu renforcer l’IDS (Institut des Données de Santé) en créant l’INDS (Institut National des Données de Santé) et s’est attaché à lui attribuer de nombreuses nouvelles fonctions.
Il fallait justifier le renforcement de l’INDS, mais la seule gestion du SNDS (Système National des Données de Santé) ne pouvait suffire. Il fallait que l’INDS intervienne sur tous les fronts y compris si ces interventions s’avèrent inutiles et peu importe si l’Institut dispose, ou pas, des compétences requises.
Au titre de ces activités inutiles, le décret n°2016-1872 a donc imaginé la création d’un répertoire public qui regrouperait toutes les études hors RIPH et notamment les études rétrospectives ou si vous préférez les études réalisées à partir de données utilisées secondairement. Il peut donc s’agir d’une utilisation secondaire de données personnelles provenant du soin ou obtenues initialement dans le cadre d’une autre recherche ou étude.
Tel était le sens du dernier alinéa de l’article 34-2 : « Pour les traitements qui ne sont pas enregistrés dans le répertoire public mentionné à l’article L. 1121-15 du code de la santé publique [celui qui regroupe les RIPH mais qui n’existe toujours pas !], les traitements sont enregistrés dans un répertoire public mis à disposition par le secrétariat unique. ».
En d’autres termes, les responsables de recherches hors RIPH doivent déclarer leurs études auprès de l’INDS (présenté également comme étant le « secrétariat unique » !) afin que ce dernier puisse rendre publique cette information.
Plus précisément, les responsables de traitement de données à caractère personnel répondant aux méthodologies de référence (MR) doivent faire une déclaration globale de conformité à la CNIL et ensuite ont l’obligation de déclarer à l’INDS chaque traitement correspondant à chaque étude ne répondant pas à la définition d’une RIPH (Recherche Impliquant la Personne Humaine).
Malheureusement, le décret n°2018-687 du 1er août 2018, bien que modifiant à la marge l’article 34-2 n’est pas venu supprimer cette obligation déclarative inutile, ne ressortant donc d’aucun texte législatif.
Les responsables de recherche doivent donc déclarer à l’INDS chaque étude qu’ils réalisent en conformité avec la MR-004, MR-005 et MR-006 et qui sera donc rendue publique. S’agissant des MR-005 et MR-006, correspondant à la réalisation de recherches, d’études ou d’évaluations à partir du PMSI qui entrent dans le cadre du SNDS, on pourrait comprendre l’intervention de l’INDS mais, en revanche, comment justifier la déclaration à l’INDS des études sans lien avec le SNDS ?
Quoiqu’il en soit, l’INDS n’a pas perdu de temps et le répertoire est d’ores et déjà opérationnel. 11 études hors RIPH ont d’ores et déjà été déclarées !
Pourquoi porter un tel jugement de valeur affirmant qu’il s’agit d’une activité inutile confiée à l’INDS ?
Quelle outrecuidance me permet de porter un tel jugement ?
Peut-être simplement du bon sens ?
Peut-on m’indiquer l’utilité d’une telle formalité administrative au moment où le RGPD vient simplifier considérablement les démarches administratives y compris pour les traitements dans le domaine de la recherche et des études en santé ?
Quelle est l’utilité d’une telle déclaration, d’un tel registre public ? Quelle raison impérieuse d’intérêt général justifie de telles démarches administratives pour les responsables de recherche et une telle publicité ?
A quel titre l’INDS et donc ses composantes sont en droit de disposer de la liste de l’ensemble des études répondant à la MR-004 et de l’identité complète des responsables de ces recherches ?
Quelle est l’utilité de rendre publique une information par laquelle nous apprenons qu’un industriel de santé conduit une étude intitulée « traitement de Citrulline et/ou Arginine des patients présentant un trouble du cycle de l’urée » jusqu’en juin 2020 ? Quel est l’intérêt d’une telle information parcellaire n’identifiant pas le responsable de la recherche ?
En fait, si une telle obligation déclarative avait du sens, était légitime, une autorité quelconque aurait prévu une sanction en cas de non-respect !
Or, il n’existe aucune sanction si vous ne déclarez pas votre recherche, étude ou évaluation hors RIPH auprès de l’INDS.
Dans ces conditions, pourquoi respecter cette énième formalité administrative en déclarant à l’INDS vos études rétrospectives correspondant, a minima, à la MR-004 ?