Compte tenu de la progression de l’épidémie en France, les promoteurs d’essais cliniques doivent travailler sur différents scenarii susceptibles de se produire afin de pouvoir réagir promptement et efficacement.
Parmi ceux-ci nous pouvons imaginer l’apparition d’un cas de CoVid-19 chez l’un des volontaires participant à un essai mais, d’autres peuvent être liés à la mise en place de mesures de confinement rendant impossible le déplacement des volontaires ou bien encore les conséquences du plan blanc ne permettant plus aux investigateurs et leurs équipes de respecter les termes du protocole et notamment, les délais imposés par ce dernier.
Quel que soit le scenario, ces événements devront être pris en compte par le promoteur et les investigateurs. Ils devront être qualifiés et les mesures réglementaires adéquates devront être mises en œuvre.
Pour illustrer nos propos, nous prendrons donc comme hypothèse l’apparition d’un cas de CoVid-19 chez l’un des volontaires participant à un essai clinique.
Naturellement les incidences et les mesures prises par le promoteur varieront en fonction de nombreux facteurs dont bien évidemment, la nature de l’essai concerné. Nous pouvons aisément imaginer que l’apparition d’un cas de Covid-19 chez des volontaires participant à un essai clinique de phase I consistant en une première administration à l’homme et donc exigeant une hospitalisation permanente des volontaires, ne sera pas traitée de la même manière que pour un essai clinique de phase III où les volontaires rencontrent l’investigateur et son équipe une fois par mois.
Ainsi, selon les caractéristiques de l’essai, chaque promoteur devra imaginer un scenario particulier, scenario qui dépendra de la qualification de l’événement par ce dernier.
Dans la majorité des cas, mais peut-être pas systématiquement, nous pouvons penser qu’un tel événement sera qualifié de « fait nouveau intéressant la recherche (…) susceptible de porter atteinte à la sécurité des personnes qui s’y prêtent », en application des dispositions de l’article L. 1123-10 du CSP.
Pour mémoire, l’avis au promoteur d’essais cliniques, Tome II. Vigilance des essais cliniques, définit les faits nouveaux comme :
« toute nouvelle donnée pouvant conduire à une réévaluation du rapport des bénéfices et des risques de la recherche ou du produit objet de la recherche, à des modifications dans l’utilisation de ce produit, dans la conduite de la recherche, ou des documents relatifs à la recherche, ou à suspendre ou interrompre ou modifier le protocole de la recherche ou des recherches similaires. Pour les essais portant sur la première administration ou utilisation d’un produit de santé chez des personnes qui ne présentent aucune affection : tout effet indésirable grave. »
Il appartient donc au promoteur et à l’investigateur de qualifier l’apparition d’un cas de CoVid-19 au regard des précisions apportées par l’ANSM dans son avis et selon la qualification retenue, de prendre les mesures urgentes de sécurité qui s’imposent.
Dans une telle hypothèse et lorsqu’il s’agit d’un essai de première administration ou de première utilisation d’un médicament ou d’un produit de santé chez les personnes ne présentant aucune affection, le promoteur doit informer, sans délai, l’ANSM et le CPP des mesures qu’il compte mettre en œuvre ou d’ores et déjà mises en œuvre.
Il est important de noter que de telles mesures urgentes de sécurité, consistant en l’arrêt de la recherche ou en la prise de mesures immédiates (telle qu’une suspension d’essai) doivent être suivies, en application des dispositions de l’article R. 1123-62 du CSP, soit d’une déclaration concernant la fin de la recherche, soit d’une demande de modification substantielle.
Le promoteur sera donc confronté à deux hypothèse, soit arrêter purement et « simplement » son essai, soit essayer de le poursuivre coute que coute en présentant une modification substantielle visant à éviter cet arrêt.
La modification substantielle pourrait consister à demander une suspension exceptionnelle de l’essai permettant soit de suspendre temporairement les inclusions, l’administration du produit (si le design de l’étude le permet), ou d’augmenter le nombre de volontaires susceptibles d’être inclus pour pallier ceux dont les données ne pourront être exploitées faute d’avoir pu respecter les conditions d’administration imposées par le protocole.
Une telle demande d’avis et d’autorisation de la modification substantielle du protocole doit être déposée dans les 15 jours suivant l’introduction des mesures urgentes de sécurité. Ces mesures s’appliquant aux recherches interventionnelles (RIPH 1), la demande de modification substantielle, conséquence des mesures urgentes de sécurité, devra être adressée tant au CPP qu’à l’ANSM.
Compte tenu de la progression de l’épidémie telle que nous la constatons jour après jour, des délais extrêmement courts pour présenter une demande de modification substantielle, il apparaît nécessaire, voire impératif, de travailler sans tarder sur ces différents scenarii afin d’être en mesure de pouvoir présenter dans des délais impartis une demande de modification substantielle visant à sauver les essais cliniques en cours.