Après le vote de l’Assemblée nationale intervenu le 26 janvier 2012 qui a adopté à l’unanimité – excusez du peu ! – la proposition de loi (PPL) relative à la recherche impliquant la personne humaine – dite Jardé – ce sera au tour du Sénat de se prononcer le 21 février 2012.
Puis dès sa publication au Journal officiel, soit logiquement dans la foulée, nous aurons une magnifique loi qui loin de simplifier l’encadrement des recherches impliquant la personne humaines, complexifiera largement le quotidien des chercheurs sans apporter d’évolutions majeures.
Ne prenons qu’un seul exemple : Pour les recherches non-interventionnelles la situation reste inchangée voire s’aggrave.
Le promoteur d’une telle « recherche » doit obligatoirement obtenir l’avis favorable d’un CPP désigné de manière aléatoire. C’est nouveau et c’est français !!!
Pour l’instant, les CPP se prononcent dans un délai de 35 jours (Gageons que le décret adaptera ce délai, mais est-ce bien éthique d’avoir des délais trop courts ? !).
Si l’avis est favorable, le promoteur d’une telle recherche n’est pas obligé de saisir le CCTIRS avant de solliciter l’autorisation de la CNIL pour le traitement de données qui sera mis en œuvre dans le cadre de l’étude non-interventionnelle.
Le promoteur d’une recherche biomédicale perd ainsi au minimum 5 jours puisque le délai imparti au CCTIRS pour rendre son avis à la CNIL est d’un mois (passé ce délai l’avis est réputé favorable, ce qui n’est pas le cas pour le CPP dont le silence gardé ne vaut pas avis favorable !)
Pire encore ! La CNIL peut décider, malgré l’avis favorable d’un CPP, de saisir le CCTIRS. Une telle saisine peut paraître légitime lorsque l’on a conscience du niveau de connaissances de la loi Informatique et Libertés dans certains CPP !
Tout ça pour ça, au bout de trois ans d’examen : je dis bravo !!!
Sinon, au titre des réjouissances, comme en 2004 les utilisateurs de cette loi devront faire le tri entre les dispositions qui s’appliqueront immédiatement et celles qui nécessiteront d’attendre les textes d’applications (décret et arrêtés).
Donc quelques beaux mois de galères en perspective ! Surtout lorsque l’on sait que le remplacement du terme « recherche biomédicale » par le terme « recherche interventionnelle » implique de republier au bas mot environ 80 arrêtés !
A croire, qu’ils n’ont que cela à faire au ministère de la santé !
Je reviendrai bien entendu sur les conséquences pratiques de cette nouvelle loi, dès son adoption définitive, mais d’ores et déjà voici quelques éléments à prendre en compte :
- La MR 001 ne s’appliquera plus étant donné qu’elle ne concerne que les « recherches biomédicales » et non les « recherches interventionnelles » ;
- Les CPP deviennent des organismes administratifs chargés de la qualification des protocoles en lieu et place des promoteurs et l’on se demande s’ils demeurent indépendants ;
- Le projet de modification de la directive 2001/20/CE devrait être connu avant l’été. Donc préparez-vous à une modification de la loi Jardé dans 2 à 3 ans afin de transposer les évolutions imposées par la législation européenne !
Et dire qu’à l’Assemblée nationale, le 26 janvier 2012, députés et ministre se congratulaient de manière obséquieuse de l’aboutissement d’un tel texte consistant en une véritable avancée pour la recherche clinique française !