Par un arrêt du 12 juillet 2018 (CE, 12 juillet 2018 N°387156), le Conseil d’Etat met fin au suspense suscité par la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) rendue le 7 décembre 2017 (CJUE, 7 décembre 2017, C-329/16).
Pour mémoire, à l’occasion d’un litige opposant le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (SNITEM) et Philips France, au premier Ministre et au Ministre des affaires sociales et de la santé, concernant la légalité de l’obligation de certification des logiciels d’aide à la prescription prévue par les articles 1er et 2 du Décret du 14/11/2014, le Conseil d’Etat avait interrogé la Cour (décision du 8 juin 2016) sur la qualification de dispositif médical (au sens de la Directive 93/42/CEE) d’un logiciel de détermination de la prescription médicamenteuse, dont l’une des fonctionnalités permet l’exploitation des données propres au patient, alors qu’il n’agit pas directement dans ou sur le corps humain.
Reconnaissant à ce logiciel la qualification de dispositif médical, la CJUE avait alors estimé que seul le marquage CE devait conditionner la mise sur le marché du logiciel, aucune procédure supplémentaire telle qu’une procédure de certification n’étant nécessaire et justifiée ni au regard d’un motif de veille sanitaire (article 14 ter de la Directive 93/42/CEE) ni au regard de la clause de sauvegarde prévu par l’article 8 de la Directive.
La Cour avait en substance appelé à l’abrogation des dispositions litigieuses que le législateur français n’avait eu pourtant de cesse d’élargir.
La décision du Conseil d’Etat était donc attendue et, sans surprise, le Conseil d’Etat suit la position de la CJUE.
Ainsi, la haute juridiction annule l’obligation de certification des logiciels d’aide à la prescription médicale, pour celles de leurs fonctionnalités qui permettent l’exploitation de données propres à un patient à des fins mentionnées par la Directive 93/42/CEE, ainsi que pour les modules qui en sont des accessoires au sens de ces dispositions (annulation du 3° de l’article 1er et l’article 2 du décret du 14 novembre 2014). Précisons que les juges n’ont pas assorti cette annulation d’une limitation de ses effets dans le temps comme le réclamait le ministre des solidarités et de la santé.
Notons que sur son site internet, la HAS a pris acte que le marquage CE attestant de la conformité du logiciel aux exigences essentielles suffit ainsi à démontrer la sécurité et les performances d’un tel logiciel et que par conséquent l’obligation française de certification des logiciels d’aide à la prescription ne peut aujourd’hui être exigée des éditeurs de logiciels. La HAS souligne cependant qu’une telle certification reste possible sur la base du volontariat.
Par cet arrêt, le Conseil d’Etat veille au respect des objectifs de la réglementation européenne relatif aux dispositifs médicaux et met en garde le pouvoir exécutif en cas de non-respect des faibles marges de manœuvre qui lui sont ouvertes par la réglementation européenne comme en témoigne une autre récente décision (CE 26 avril 2018 N° 407982 – Le Conseil d’Etat annule le Décret relatif au résumé des caractéristiques du dispositif médical).