Pour ceux qui s’interrogent sur les modalités de financement de la recherche clinique dans les établissements de santé, je vous recommande la lecture du rapport établi par Pierre-Louis Bras et le Docteur Gilles Duhamel de l’IGAS. Ce rapport [IGAS n°RM2009-139P, daté de novembre 2009, s’intéresse plus globalement au financement de la recherche, de l’enseignement et des missions d’intérêt général (MIG) dans les établissements de santé.
Ce rapport décrit très précisément les modalités de financement, au sein de l’hôpital, des activités autres que celles des soins et notamment celles de la recherche clinique.
Vous découvrirez ainsi pourquoi certains chercheurs institutionnels veulent à tout prix publier les résultats de leurs « recherches » (évaluations) dans certaines revues scientifiques. L’équation est simple : publication = argent !
« – Une dotation liée aux résultats de la recherche mesurés à partir des publications par le biais d’un score, dit score SIGAPS. Les publications issues de l’établissement sur les cinq dernières années sont recensées. Un nombre de points est attribué à chaque publication en fonction du niveau de la revue lui-même mesuré par son « impact factor » relatif (nombre de citations des articles de la revue) et du rang de l’auteur parmi les signataires. Les points obtenus sont valorisés en euros. Le point SIGAPS valait 1145,4 euros en 2008, il vaut 1130,5 euros en 2009. »
Ce rapport revient également sur les réformes introduites en 2009 concernant le financement des MERRI (Mission d’Enseignement, de Recherche, de Recours et d’Innovation) et l’introduction d’un nouvel indicateur « recherche clinique » dans la part modulable.
« – Une dotation, introduite en 2009, qui mesure, par le biais d’un score dit score SIGREC, l’engagement dans les activités de recherche en fonction du nombre pondéré d’études interventionnelles. Chaque étude ouvre droit à un nombre de points qui varie selon son ampleur (mono ou multicentrique), selon sa nature (académique ou industrielle), selon la phase de développement (1 et 2, 3), selon que l’établissement est promoteur, coordonnateur ou simple investigateur. Le point SIGREC vaut 1771 euros en 2009. Il est prévu en 2010 d’introduire un élément de pondération supplémentaire par tranche de patients inclus. »
Il est intéressant de noter que ce rapport utilise d’ores et déjà le terme de « étude interventionnelle » alors même que la création d’une telle catégorie d’étude ou de recherche est en cours de discussion devant le Parlement et que pour l’instant notre droit ne reconnaît que les « recherches biomédicales » ou « recherches visant à évaluer les soins courants » !
Autre information intéressante qui jusqu’à présent était passée sous silence: les financements extérieurs et notamment privés.
Alors que le rapport Marescaux semblait ignorer de tels financements (Voir sur ce point « L’omerta autour des recettes générées par la promotion industrielle » , le présent rapport nous indique : « Selon le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, les CHU et CLCC recevaient, en 2007, pour la recherche clinique 29 millions de l’industrie, 30 millions de sources publiques, 18 millions d’associations et 8 millions de l’étranger. »
En bas de page, les auteurs citent une autre source, le LEEM, qui indique « ces données issues des déclarations des établissements sous estiment dans des proportions très importantes les sommes consacrées par l’industrie pharmaceutique à la recherche clinique en établissement. »
Décidément l’équation « selon les organisateurs ils étaient 20 000 et selon la police 500 » fonctionne également lorsque l’on essaie de connaître les sommes versées par le privé pour la réalisation d’essais cliniques dans des établissements publics.
Mais où sont ces « très importantes sommes d’argent » ?
Résolument, il s’agit là d’un rapport très intéressant dont les enjeux sont cruciaux pour la recherche clinique française.