Le rapport Marescaux et la recherche biomédicale dans les CHU

Le 24 novembre 2008, le professeur Jacques Marescaux s’est vu confier par Monsieur le Président Nicolas Sarkozy la mission de proposer un nouveau modèle pour les CHU, fondé sur l’excellence.

Ainsi, le professeur Marescaux, à la tête d’une Commission constituée de personnalités politiques, scientifiques, médicales, industrielles et institutionnelles se devait de produire un bilan de la production scientifique des équipes de recherche dans les CHU et également d’examiner les circuits de financement en distinguant les flux qui ressortent à la recherche, à l’enseignement, aux soins de recours et aux soins de proximité et également les conditions et développements des partenariats entre les CHU et les entreprises, en particulier les industries de santé.

La Commission avait également pour mission de souligner les éventuelles difficultés juridiques et de les identifier afin que des réponses puissent y être apportées.

Sans entrer dans le détail du rapport de la Commission sur l’avenir des Centres Hospitaliers Universitaires, nous nous attacherons essentiellement aux développements qui intéressent la thématique de ce blog, à savoir la recherche médicale et plus particulièrement la recherche biomédicale.

Ce rapport est extrêmement intéressant à deux titres.

1. Un système de recherche biomédicale français complexe, insuffisamment coordonné et lisible

Tout d’abord, il est effectivement reconnu que la production scientifique biomédicale française stagne et est en retrait vis-à-vis de nos voisins.

Selon ce rapport, la France a insuffisamment soutenu la recherche dans le domaine des Sciences du Vivant. L’explication de cette stagnation, voire de cette mise en retrait par rapport à nos voisins, se justifie également par un système de recherche biomédicale français complexe, insuffisamment coordonné et lisible.

J’insiste sur le fait qu’à aucun moment, le rapport n’évoque, contrairement au rapport Jardé relatif à la proposition de Loi du même nom, l’existence d’ « un dispositif juridique complexe et incomplet ».

En effet, dans toutes les pages du rapport qui n’en compte pas moins de 69, annexes comprises, à aucun moment il n’est porté un quelconque grief à l’encadrement juridique de la recherche biomédicale qui serait la cause d’une stagnation ou d’un retard de la recherche biomédicale française.

Bien au contraire, ce rapport souligne la complexité de l’organisation de la recherche biomédicale publique et souhaite reconstruire une dynamique de cette recherche en simplifiant le paysage des opérateurs publics de la recherche biomédicale et en réduisant le nombre d’instances et de procédures d’évaluation.

Pour illustrer cette « jungle », nous prendrons tout simplement l’annexe 2 du rapport Jardé qui liste les personnes auditionnées par le rapporteur. Pas moins de trois organisations, représentant les promoteurs institutionnels ou la recherche biomédicale publique, ont été auditionnées par le rapporteur. 

Ainsi, nous pouvons notamment constater qu’ont été auditionnés la Coordination des Promoteurs Institutionnels (CPI), mais également le Comité National de la Recherche Clinique (CNRC) et enfin le Comité National de Coordination de la recherche (CNCR). Nous pouvons comprendre, à force de multiplier ces instances, les difficultés que peuvent rencontrer la recherche biomédicale publique et les lourdeurs administratives qui peuvent en découler.

C’est sûr, il est plus facile de critiquer un système juridique en l’accusant de tous les maux plutôt que de remettre en cause l’existence d’institutions dont il est difficile de mesurer la nécessité et surtout la légitimité !

2. L’omerta autour des recettes générées par la promotion industrielle

Nous regrettons qu’à aucun moment le rapport n’évoque très spécifiquement le financement de la recherche biomédicale ou plus précisément le devenir des sommes versées par la promotion industrielle lors de la conduite de recherches biomédicales au sein des CHU.

Ces sommes sont vraisemblablement très importantes et pourraient constituer une source de financement intéressante pour la recherche publique, à la condition d’être gérées de façon transparente et équitable.

Ce n’est un secret pour personne, la plupart des sommes versées aux investigateurs (hors surcoûts), passe rarement par les CHU, mais bien par des associations de recherche constituées dans la majorité des services au sein même des CHU.

Aux dires des intéressés, ces associations de Service se constituent notamment afin de pallier à l’absence de réactivité et de souplesse administrative des CHU.

La comptabilité publique explique également la constitution de ces associations. Il est souvent reproché au système actuel de ne pas permettre un retour financier vers les services les plus dynamiques en matière de recherche biomédicale.

Visiblement, ces sources de financement demeurent taboues et il est regrettable que le rapport ait oublié leur existence. A moins qu’il s’agisse d’une énième légende urbaine ?