Leçon de bidouillage juridique : la DGOS publie une note d’information sur l’utilisation de la convention unique

Bien que parue au début du mois d’août, en pleine période de vacances estivales, la note d’information de la DGOS du 1er août 2018 relative à l’utilisation de la convention unique n’est pas passée inaperçue.

Il aura quand même fallu attendre presque deux ans pour que le Ministère apporte des précisions concernant la convention unique mise en place par le Décret et l’Arrêté du 16 novembre 2016. L’utilisation de la convention unique suscite en effet depuis sa mise en place de nombreuses interrogations de la part des acteurs de la recherche clinique, notamment s’agissant de la notion de « structure tierce », nouvelle partie prenante à la convention unique depuis la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016 et censée arrondir quelques angles d’une réforme quelque peu bancale.

Si la DGOS n’apporte pas plus de précision à la notion de structure tierce que l’article R. 1121-3-1 du Code de la santé publique, si ce n’est en citant quelques exemples de structures juridiques pouvant remplir le rôle de structure tierce (GC, GIE, fondation hospitalière, etc .), la précision selon laquelle plusieurs structures tierces peuvent être signataires, si la recherche le requiert, est la bienvenue, évitant ainsi les interprétations opportunistes pouvant être réalisées par certains établissements de santé.

En revanche, une précision interpelle en ce qu’elle prévoit le remboursement à une structure tierce de « Coûts » mentionnés dans l’annexe 2 de la convention unique.

L’article R. 1121-3-1 du Code de la santé publique définit pourtant les Coûts comme des frais engagés par l’établissement de santé, une maison ou un centre de santé et relatifs notamment aux tâches d’investigation nécessaires à la recherche et aux tâches administratives et logistiques liées à la recherche.

La structure tierce, selon l’article L. 1121-16-1 IV du Code de la santé publique, est quant à elle destinée à recevoir les Contreparties versées par le promoteur et liées à la qualité escomptée des données issues de la recherche. Ces Contreparties sont mentionnées à l’annexe 3 de la convention unique. Il aurait été apprécié que la DGOS apporte des précisions sur le traitement fiscal de ces Contreparties qui sont facultatives et qui ne correspondent pas à la rémunération d’un service rendu par l’établissement de santé ou la structure tierce !

La DGOS sème la confusion entre ce qui doit être considéré comme des Coûts (la DGOS prend pour exemple la mise à disposition de TEC) et ce qui doit être considéré comme étant des Contreparties versés à la structure tierce. On s’interroge également sur l’entité qui va facturer ces fameux Coûts, la structure tierce ou l’établissement de santé.

Un autre élément de cette note d’information suscite la surprise. Il s’agit d’une prestation engendrant un Surcoût (i.e requis par le protocole et lié à la prise en charge du patient ou du volontaire sain) fournie par un prestataire extérieur au lieu de recherche.

Deux cas sont alors prévus à savoir soit l’établissement de santé qui sous-traite la prestation prend directement à sa charge le coût financier afin de refacturer le Surcoût au promoteur, soit le promoteur traite directement avec le prestataire extérieur. Dans les deux cas la mention du Surcoût apparait dans l’annexe 2. On s’interroge dès lors sur la justification de cette mention dans cette annexe ne recensant pourtant que les frais engagés par l’établissement, la maison ou le centre de santé.

Donc si nous résumons, dans l’hypothèse où un promoteur veut recourir à des TEC extérieurs qui seraient mis à disposition par l’intermédiaire d’une CRO, cette prestation correspondant à un Surcoût devra figurer dans l’annexe 2 de la Convention unique alors même que la CRO n’est pas partie à la Convention unique et qu’un contrat direct est passé entre le promoteur et la CRO ! C’est d’une logique implacable, totalement cohérente avec le principe de l’effet relatif des contrats posé par l’article 1199 du Code civil … !

Par ailleurs, quel élément objectif permet de créer une telle discrimination entre une structure tierce et un prestataire de services, permettant à ce dernier de signer un contrat indépendant directement avec un promoteur sans le truchement de la convention unique ?

Visiblement, cet élément objectif se rapporte au caractère extérieure de la réalisation de la prestation. Il conviendrait d’identifier la prestation qui serait réalisée en dehors de l’établissement de santé (donc du centre investigateur) mais nécessaire à l’investigation clinique, c’est-à-dire réalisée sous le contrôle et la direction de l’investigateur. Un exemple concret illustrant cette hypothèse aurait été le bienvenu au sein de cette note d’information, voire dans la FAQ !

Enfin, on regrette que la motivation de la transmission de la convention unique au Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) n’ait pas été explicitée. Cependant, en consultant la FAQ publiée concomitamment à cette note d’information (voir ci-dessous), nous apprenons que la transmission de la convention au CNOM doit s’effectuer même lorsque l’investigateur n’est pas un médecin ! Nous attendons toujours de comprendre la logique sous-tendant cette nouvelle obligation totalement saugrenue …

Loin de clarifier les modalités d’utilisation de la convention unique, cette note d’information risque malheureusement de susciter de nouvelles interrogations des professionnels du secteur et de s’éloigner des principes de simplification juridique qui avaient pourtant guidé l’instauration de la convention unique.

NOTE D’INFORMATION N° DGOS/PF4/2018/191 du 1 août 2018 relative à l’utilisation de la convention unique pour la recherche à finalité commerciale impliquant la personne humaine NOR : SSAH1821794N)