Dans l’indifférence générale, les CPP se sont vus conférer, par la loi Jardé, le statut de personne morale de droit public pour maintenant en toute logique se voir appliquer le régime de comptabilité publique. A quand le statut de fonctionnaire ou d’agent public pour les membres des CPP ?
Ce changement de statut peut paraître pour certains anodin, mais pas tant que ça ; les CPP sont en train de vivre une véritable révolution ! Le dernier épisode remonte au 16 janvier 2013, date à laquelle a été publiée au JORF le décret n°2013-45 du 14 janvier 2013 (qui rétroagit au 1er janvier 2013 !) relatif à l’application aux CPP du régime de comptabilité publique.
Ainsi, les dispositions réglementaires du CSP et notamment l’article R. 1123-19 sont remplacées par de nouvelles dispositions mais également complétées par les articles R. 1123-19-1, R. 1123-19-2 et R. 1123-19-3.
Je ne rentrerai pas dans les détails techniques de la comptabilité publique, en étant bien incapable, mais j’invite tous les passionnés de cette matière à consulter les 31 pages et 240 articles du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (JORF du 10 novembre 2012). Si vous les rapprochez des nouvelles dispositions de l’article R. 1123-19 du CSP, vous allez adorer !
Petit extrait : « Par dérogation aux dispositions de l’article 3 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, les comités de protection des personnes sont soumis au régime budgétaire, financier et comptable défini par les titres Ier et III de ce même décret, à l’exception des 1° et 2° de l’article 175, des articles 178 à 185, 204 à 208, de la dernière phrase de l’article 210 et des articles 215 à 228, sous réserve des articles R. 1123-19-1 à R. 1123-19-3 ci-après. »
Revenons à nos CPP. Donc, exit les experts comptables imposés par le point 8.1.1 de l’annexe de l’arrêté du 13 janvier 2010 fixant le règlement intérieur type devant être adopté par les CPP et place aux agents comptables nommés par arrêté du ministre chargé du budget (Art. R. 1123-19-3 du CSP).
Ainsi, l’arrivée d’agents comptables au sein des CPP confirme l’évolution initiée par la loi Jardé qui, à la suite d’un amendement tardif, était venu doter les CPP de la personnalité juridique de droit public (Art. 5 de la loi n°2012-300).
Cette clarification change profondément l’esprit qui entourait le fonctionnement des CPP depuis leur création et bien avant, du temps où il s’agissait des CCPPRB.
D’une nature mixte, voire hybride et quoiqu’il en soit issue d’une construction sui generis (seuls les juristes semblent pouvoir se satisfaire de telles créations innovantes !), le statut des CPP devait leur conférer une totale indépendance vis-à-vis de toute forme de pression et ne dépendre d’aucune autorité hiérarchique.
Force est de constater que la loi Jardé est venue modifier ce système en profondeur conférant officiellement une nature publique aux CPP mais surtout en les rattachant à la Commission Nationale des Recherches Impliquant la Personne Humaine (CNRIPH) instituée auprès du Ministre chargé de la santé.
Concrètement, les futurs CPP seront ni plus ni moins des sous-entités du ministère de la santé dont l’activité dépendra du bon vouloir de la CNRIPH et donc du ministre. En effet, en application des futurs articles L. 1123-6 et L. 1123-1-1 du CSP, la CNRIPH sera chargée de désigner les CPP qui devront examiner les projets de recherche et les demandes de modification substantielle.
Le fonctionnement des CPP sera donc dépendant des protocoles que le CNRIPH voudra bien lui confier et ne rétorquez pas que cette attribution sera aléatoire, car je ne sais pas pourquoi, mais j’ai du mal à y croire !
Faut-il passer par de telles solutions pour optimiser le fonctionnement de ces CPP et répondre demain aux exigences de réactivité qui seront imposées aux Etats membres par le futur règlement relatif aux essais clinique de médicament qui remplacera la directive 2001/20/CE ?
Est-ce qu’un comité d’éthique dépendant directement d’une administration répond aux critères fixés par la Convention d’Oviedo (Art. 16) ou bien encore aux dispositions de la déclaration d’Helsinki qui prévoit qu’un tel comité doit être indépendant du chercheur, du promoteur et de toute autre influence indue ?
Voilà quelques questions qui mériteront d’être approfondies dans les mois à venir et notamment dès la publication du décret devant préciser les conditions d’application de la loi relative aux recherches impliquant la personne humaine et surtout conditionnant son entrée en vigueur.
Voir :
– décret n°2013-45 du 14 janvier 2013